| |

DÉCOUVERTE - Maïlys Dorn, architecte d'intérieur, fait le tour du monde en famille pour explorer l'habitat de demain. Première étape : les maisons troglodytes de Matmata construites au XIIe siècle en Tunisie

Maïlys Dorn, architecte d'intérieur et auteure du blog optimisemonespace.com, est partie avec sa famille pour un tour du monde de 333 jours. Partout, elle pose la même question : "Quel sera l'habitat de demain ?". Elle partage ses rencontres et découvertes sur 18h39.fr.

C'est aux portes du Sahara tunisien que Georges Lucas a trouvé l'inspiration pour le décor de ses premiers épisodes de Star Wars. La planète Tatooine, sur laquelle est né Anakin Skywalker et où a grandi Luke, tire son nom de la ville de Tataouine.

Le village d'enfance du Jedi n'est autre qu'une légère modification des véritables maisons troglodytes du village de Matmata, proche de Tataouine.

Ces habitations, datant du XIIe siècle et toujours habitées par le peuple berbère, seraient-elles assez futuristes pour être considérées comme l'habitat de demain ?

© Maïlys Dorn

Des maisons creusées dans les collines

Conçues pour être invisibles, ces maisons troglodytes ne peuvent être comptées que depuis le ciel. Vues d'en haut, on croirait des taupinières géantes, creusées dans la terre sableuse.

À l'intérieur, on retrouve le principe d'organisation de la maison avec patio. Différentes cellules sont creusées autour d'une cour centrale. À chaque cellule sa fonction : chambre, cuisine, pièce pour moudre la farine, pour travailler le tissage des tapis berbères...

Vue aérienne des maisons troglodytes.

Vue aérienne des maisons troglodytes. © Maïlys Dorn

Mais la construction n'a rien à voir avec celle d'une maison classique. On se sert d'une colline, que l'on creuse depuis le sommet jusqu'au pied de ce relief naturel.

La cour centrale.

La cour centrale. © Maïlys Dorn

La première étape consiste donc à creuser la cour centrale, avant de s'attaquer aux différentes pièces tout autour. Enfin, pour pouvoir entrer et sortir de cette maison, on creuse un tunnel vers l'extérieur, au bas de la colline. La porte d'entrée est le seul élément visible qui indique l'emplacement d'une habitation.

On dénombre aujourd'hui environ 250 maisons troglodytes à Matmata, dont seulement 35 seraient encore habitées.

Dans les années 70, de graves inondations auraient eu pour conséquence de faire fuir leurs habitants vers les immeubles de briques et de ciment d'une "Matmata Nouvelle", construite à la hâte par le gouvernement.

Le salon.

Le salon. © Maïlys Dorn

Rares sont les familles qui acceptent d'ouvrir la porte de leur "maison sous terre". Celle que j'ai pu visiter a été transformée en semi-musée par ses habitants. Ils y présentent habits traditionnels et pierre à tourner à la main pour transformer les graines en farine.

L'accueil des touristes les a poussés à relier cette maison à une autre, privée, dans laquelle ils se réfugient le soir.

La chambre.

La chambre. © Maïlys Dorn

Trouver la fraîcheur dans la terre

Dans cette région où il ne pleut que 60 jours par an, l'eau est rare est précieuse. Elle est collectée dans une citerne enterrée, à l'extérieur de la maison. Ici, pas de robinets qui fuient, on sort plonger son seau dans le puits. L'eau que l'on remonte, puisée à plusieurs mètres de profondeur, est fraîche et pure.

L'électricité a été installée, symbole de modernité qui a permis aux habitants de continuer à vivre dans ces demeures creusées aux XIIe et XIIIe siècle.

Dans la cuisine.

Dans la cuisine. © Maïlys Dorn

La maîtresse de maison, très réservée, nous accueille pourtant chaleureusement dans la cour centrale. Elle nous a préparé un thé à la menthe, et nous invite à déguster du pain tabouna, trempé tour à tour dans de l'huile d'olive et du miel.

Elle se plaint discrètement de la chaleur du soleil. Le contraste de température entre l'extérieur et l'intérieur des cellules est pourtant saisissant.

Dans un village voisin, une autre construction troglodyte, creusée à flanc de montagne, a été transformée en restaurant. La salle mesure tout au plus 30 m2.

Alors que le soleil tape ardemment sur nos têtes au dehors, l'air est frais et ventilé à l'intérieur.

© Maïlys Dorn

"Elle serait donc là, la solution au réchauffement climatique ?" J'interroge le guide qui nous accompagne. Après avoir ri aux éclats, il me répond : "Oui, c'est sûr, vous autres, vous pouvez commencer à sortir vos pelles et creuser !"

© Maïlys Dorn