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HEAVY METAL - Et si la solution à la crise de l'immobilier, c'était de construire sa maison ? C'était l'ambition de ce couple qui vit dans l'Ain.

"On s'est lancé à l'aveugle, c'est notre motivation qui a fait qu'on s'en est sortis". Quand Alicia fait le bilan de l'autoconstruction de sa maison en containers, elle ne regrette rien mais reconnaît qu'elle aurait aimé avoir plus d'exemples inspirants à suivre. En 2019, les maisons containers ne sont pas encore si tendance que ça et il faut donc se débrouiller tout seul pour surmonter les embûches. Aujourd'hui, ceux qui veulent se lancer dans l'aventure peuvent compter sur les conseils avisés et détaillés étape par étape de Julien Malara sur sa chaîne YouTube, par exemple, mais aussi sur l'exemple inspirant de... leur compte Steelbox sur Instagram !

Avant de construire sa maison, le couple n'avait rénové qu'un ancien garage en studio : "On avait posé un sol et des cloisons en placo, c'est tout", se souvient la jeune femme, qui est assistante qualité dans un centre hospitalier, tandis que son compagnon est pédicure podologue en libéral. Bref, rien à voir avec le bricolage !

Dès lors que l'idée du container a germé dans son esprit, le couple n'arrive plus à penser à autre chose. Sur Instagram, il croise un autre duo, Killian et Camille, dont l'incroyable maison en containers les convainc définitivement de passer à l'acte. "On était aussi tombé sur un reportage dans les pays nordiques, se rappelle Alicia, et les containers sont plus communs là-bas."

L'autre avantage des containers, c'est que l'autoconstruction est plus simple que pour d'autres types d'habitats, comme les maisons en A. Bien sûr, il faut respecter les règles du PLU local, mais vu d'extérieur il n'est pas possible de faire la différence entre une maison container et une maison traditionnelle en béton. Pourtant, Alicia et Yann ont acheté leur terrain dans une zone labellisée "Bâtiments de France", qui impose parfois des contraintes aux constructeurs. "Malgré nos envies parfois décalées, très écolo, le projet est passé tout de suite, s'étonne presque Alicia. Le permis a été accepté tel quel et on respecte le PLU de notre commune."

Une machine installe les fondations d'une maison en containers
Une sacrée machine pour poser les fondations ! © Steelbox

Des containers disposés en escalier et une terrasse avec vue sur toute la région

Une fois le terrain acheté, il a fallu se procurer des containers. C'est la société lyonnaise INBOX qui a fourni quatre containers dits “dernier voyage” datant de 2007. L'appellation "dernier voyage" signifie qu'ils sont étanches, mais qu'ils ne peuvent plus voyager et transporter des marchandises, ils ne servent encore que pour du stockage. En général, ils sont rouillés, déformés, le plafond n'est pas droit mais plutôt bosselé. Enfin, les 4 autres containers sont arrivés du Havre.  

Pour la structure, le couple a souhaité installer 4 containers de 12 m de longueur en haut et 4 de 6 m de longueur en bas. Ils sont disposés en escalier sur une pente forte, ce qui fait que les containers du haut reposent en partie sur ceux du bas et sur des fondations. Une partie du toit des containers inférieurs a été transformée en terrasse à l'étage. Les toits, eux, ont été végétalisés en même temps qu'ils ont été isolés.

Que reste-t-il de ces containers dans la maison ? Les murs et les plafonds ! Pas tous, car le couple a aussi recréé des cloisons en placo, mais une grande majorité. "On a aussi recyclé les portes de container en portes intérieures, détaille Alicia. Elles ont été colorées et on garde leur plaque d'immatriculation de transport qu'on va encadrer. On a voulu garder l'esprit container au maximum."

11 mois de travaux pour pouvoir y vivre

Fabriquer une maison en containers, ce n'est pas si compliqué, si l'on veut bien croire ce que nous dit Alicia. Une phase d'adaptation reste nécessaire, car les containers sont tous cabossés et il faut s'adapter en permanence. "Beaucoup de la bricole, quoi", résume la jeune femme. "On a trouvé des astuces nous-mêmes, on s'est fabriqué des outils maison pour s'aider, par exemple pour dessiner les ondulations des parois du container sur les lames du parquet, on s'est servi d'un morceau utilisé pour le placo des cloisons, qui nous a servi d'étalon."

En résumé, travailler sur des containers implique tout un éventail de contraintes qui ne sont pas insurmontables mais qui nécessitent de résoudre une multitude de problèmes. Un travail fatigant qui exige des sacrifices. "On travaillait tous les deux à temps plein dans nos jobs, raconte Alicia, donc on bossait après le boulot, le weekend et les congés ! On ne l'a pas mal vécu, ça reste un super souvenir, et c'est pas terminé !"

Le couple s'était fixé un an de travaux avant de vivre dans la maison, ce qui signifiait réaliser tout d'abord le premier étage, et le second tranquillement au fil de l'eau. Objectif plus qu'atteint visiblement : "On a emménagé au bout de 11 mois ! Mais on avait des finitions à terminer, et on a emménagé alors que le bardage extérieur n'était pas fini."

Dans leur salon, l'acier est encore bien présent. © Steelbox
© Steelbox

300 000 € de budget pour une maison de 160 m2 en matériaux biosourcés

Le budget total de l'achat du terrain et des travaux était de 300 000 euros. Le prix englobe aussi les études sur les structures, l'architecte, les études d'infiltration d'eau, le Bbio ou Besoin Bioclimatique, un coefficient qui représente l'efficacité énergétique du bâti. "Le prix du terrain était élevé, explique Alicia, parce que la situation du village est bonne, près de Bourg-en-Bresse. C'est à la campagne mais à 10 minutes d'une ville, sur les hauteurs, c'est prisé. Au final, nous bénéficions d'une maison de 160 m2 habitable."

Malgré un prix non négligeable, Alicia et Yann sont gagnants à l'arrivée. "On a forcément économisé de l'argent, ajoute Alicia. Combien coûterait le même projet en moellon ? On ne sait pas. Ce qui est certain, c'est qu'une maison autoportante sur 8m, qui repose dans le vide, c'est impossible en moellon. Le terrain est en pente et on voulait le dénaturer le moins possible. Le but, c'était de garder l'empreinte et s'y poser le plus simplement pour profiter aussi d'une vue incroyable sur la ville."

Ce n'est pas tout : les matériaux ont été quasiment tous biosourcés et sont donc recyclables et durables. Contrairement aux constructions neuves, le couple sait parfaitement quels sont les matières, les composants, qui forment leur maison. L'autre élément qui fait grimper les coûts, c'est l'absence d'aide et de subventions pour l'autoconstruction en France, un comble pour des projets menés dans le but de respecter l'environnement.
Pourtant, le jeu en vaut la chandelle. Non seulement le couple est fier d'avoir surmonté un tel défi, mais il peut capitaliser sur l'avenir. "On sait comment notre maison est faite, donc on sait la réparer ! s'enthousiasme Alicia. On n'a pas les problèmes rencontrés par les passionnés de rénovation : qu'est-ce que je vais trouver sous les murs, dans les plafonds, sous la maison, comment c'est fait ? Et puis, on a tous les outils si le moindre problème arrive."